Comment se lancer dans l'entrepreneuriat social ? Deux Changemakers répondent

Dans leur livre "Les entrepreneurs qui changent le monde", Matthieu Dardaillon et Jonas Guyot nous font faire le tour de la planète sur les traces de ceux qui la transforment. Objectif : encourager les jeunes qui veulent donner du sens à leur job à se lancer. Où, quand, comment ? Une enquête passionnante. 

C'est l'histoire de deux jeunes entrepreneurs sociaux qui se sont connus sur les bancs d'une grande école de commerce : nés en 1989 et 1990, Matthieu Dardaillon et Jonas Guyot auraient pu créer leur startup ou faire carrière dans la finance. 

Mais dès leurs études, ils veulent travailler autrement. Ils ressentent, comme vous peut-être, le besoin de mettre leurs compétences et leurs talents au service des autres. Etre utile. Agir pour faire reculer la pauvreté. Trouver des réponses à la crise énergétique, économique et sociale.

En 2012, les deux étudiants profitent d'une année de césure pour réaliser le projet "Destination Changemakers" : ils partent découvrir des entrepreneurs sociaux en France, aux Philippines, en Inde et au Sénégal. Pas seulement pour faire de belles rencontres mais pour trouver des réponses aux questions qui les taraudent : peut-on réellement concilier l'entreprise, le profit, et l'utilité sociale ? Le social business est-il un rêve ou un modèle d'avenir ? Et comment avoir le plus d'impact ?

Un guide pratique tout-terrain pour se lancer dans l'entrepreneuriat social

C'est le fruit de cette enquête qu'ils partagent dans "Les entrepreneurs qui changent le monde, De destination Changemakers à Ticket for change" (éditions Rue de l'échiquier; réédité en 2017).

Pourtant, le livre n'est pas un récit de tour du monde. Matthieu et Jonas ne s'attardent pas sur leurs aventures personnelles. Se mettant à la place d'étudiants ou de jeunes diplômés actuels, ils repartent des questions qu'ils se sont posées eux-mêmes :
- Faut-il créer son entreprise ou changer le système de l'intérieur ?
- Faut-il faire ses armes en "entreprise classique" avant de se lancer dans l'entrepreneuriat social ?
- Vaut-il mieux agir dans son pays ou à l'étranger ?
- Les jeunes sont-ils crédibles ?

Et c'est à travers leurs rencontres avec des entrepreneurs sociaux fabuleux qu'ils apportent des réponses : avec Antonio Meloto, qui fait reculer la pauvreté dans les milliers de villages philippins, avec Emmanuel Faber, le charismatique dirigeant de Danone, avec Arnaud Poissonnier, le fondateur de Balyloan, plateforme de financement solidaire ; avec les jeunes entrepreneurs indiens qui font chaque année en train le tour de l'Inde dans le "Jagriti Yatra", dans les sommets mondiaux du social business ...

Au final, on n'a pas une mais un bouquet de réponses et d'exemples tous plus inspirants les uns que les autres. Mieux qu'un récit de voyage, c'est donc un guide pratique tout-terrain pour se lancer dans l'entrepreneuriat social. 

 

Utiliser des compétences développées dans le business classique...

Premier enseignement, selon Matthieu et Jonas : l'entrepreneuriat social n'est pas un rêve, il est déjà réalité et est appelé à se développer dans un monde où la responsabilité des entreprises grandit (alors que la marge de manoeuvre des Etats et des ONG se restreint).

Deuxième enseignement : "Un entrepreneur social peut remettre l'économie au service de l'homme en utilisant des compétences développées dans le business classique, écrivent-ils, mais en changeant le but. D'autre part, il n'a pas forcément besoin d'une idée géniale pour commencer, il peut s'inspirer d'innovations sociales déjà présentes par exemple dans d'autres pays."
C'est ce qu'a fait par exemple Pierre-Emmanuel Grange, fondateur de Microdon, qui a rapporté du Mexique l'idée de "l'arrondi" pour permettre aux consommateurs de faire de tout petits dons quand ils passent en caisse.

Faire ses armes en entreprise pour acquérir une expertise peut donc être très utile, et Emmanuel Faber, dirigeant chez Danone, conseille même d'acquérir des compétences pointues dans une fonction précise avant de se lancer. 
 

... ou lancer son idée sans expérience et la tester sur le terrain

 
​Mais le livre regorge aussi d'exemples de fondateurs qui ont pu innover dans un domaine où ils avaient peu d'expérience, comme Muhammad Yunus qui, en 1983 a créé la Grameen Bank, la "banque des pauvres", pour accorder des prêts aux familles pauvres du Bangladesh. 

"Certes, soulignent Matthieu et Jonas, Muhammad Yunus est docteur en économie. Mais avant de créer cette "banque des pauvres", il n'avait aucune expérience pratique dans le monde du développement et encore moins dans celui de la finance".
 
L'inexpérience protège des préjugés qui font croire certaines choses impossibles

Or, parfois, l'inexpérience protège des préjugés qui empêchent d'imaginer qu'une chose que l'on n'a jamais faite soit possible. "Son bon sens a aussi fait la différence, car il a fallu énormément expérimenter sur le terrain". 

Troisième enseignement donc : Ne pas avoir d'expérience dans un secteur peut s'avérer un grand atout pour y développer des idées radicalement nouvelles. Mais alors il faut savoir s'entourer de personnes compétentes, écouter, et expérimenter son idée sur le terrain. "Tester, échouer, améliorer, re-tester... mais se lancer ! Oser !", conseillent les deux auteurs.

La jeunesse n'est pas un handicap mais au contraire une chance

L'itinéraire personnel de Matthieu et Jonas est aussi un exemple. Malgré leur jeune âge, à 21 et 22 ans, ils se démènent pour trouver des financements pour leur projet "Destination changemakers" et après bien des refus, finissent par décrocher le soutien de Schneider Electric qui leur demande cependant d'aller vers des projets intégrant l'accès à l'énergie.

Ils songent alors à mettre en lien les experts de Schneider Electric avec l'ONG philippine Gawad Kalinga qui développe des villages pour les pauvres. Non seulement ils obtiennent leur financement, mais grâce à ce contact, ils vont permettre le développement d'un programme d'accès à l'énergie pour toutes les fermes de Gawad Kalinga...

"La vraie question à se poser, c'est : qu'est-ce que je veux changer dans le monde, et comment en faire mon métier ?"


Comme quoi on peut, à un jeune âge, faire avancer de grandes causes. C'est d'ailleurs leur quatrième enseignement : pour se lancer dans l'entrepreneuriat social, la jeunesse n'est pas un handicap, au contraire, elle est une chance.

"La vraie question à se poser, disent-ils est "qu'est-ce que j'aime, qu'est-ce que je veux changer dans le monde, et comment puis-je en faire mon métier", et pas uniquement "quelles sont les voies que l'on m'offre à la sortie de mon école !"

Ticket for change : une association pour éveiller les vocations

Le livre les montre allant ainsi de mission en mission, de rencontre en rencontre, de stage en année de césure, jusqu'à la fin de leur études. Là, comme on s'en doute, ils s'orientent tous les deux vers l'entrepreneuriat social.

Matthieu sort du Jagriti Yatra, ce tour de l'Inde de l'entrepreneuriat avec une idée : monter lui-aussi un "voyage-déclic dans l'Hexagone". Il veut "faire émerger une nouvelle génération d'acteurs de changement, susciter des vocations, montrer que c'est possible". Il constitue une équipe solide et crée l'association Ticket for change.

Le premier Tour a lieu du 24 août au 4 septembre 2014 et déploie un programme-pilote au slogan prometteur :"Douze jours pour changer sa vie et le reste de sa vie pour changer celle des autres". Puis il faut accompagner les projets créés par les participants dans la durée. Un MOOC (cours en ligne gratuit) monté avec HEC voit le jour... 
 

Corporate for change : l'intrapreneuriat, pour que les paquebots changent de cap

Jonas, lui, rejoint un temps l'aventure de Ticket for Change, mais en y apportant sa touche. Depuis le début de l'aventure Destination Changemakers avec Matthieu, il scrute le mouvement des paquebots. Les paquebots ?

C'est l'image qu'il donne pour expliquer que pour faire changer le monde, il y a au moins deux stratégies : certains créent leur petite entreprise et empruntent une barque, légère et agile pour tracer une nouvelle route. D'autres préfèrent rester à bord de lourds paquebots, les grandes entreprises, pour les faire changer de cap par "l'intrapreneuriat". Le virage est plus long mais l'impact plus fort.

Jonas a donc choisi de créer Corporate for Change, une entreprise qui favorise le développement de projets d'intrapreneuriat social. "Si l'on souhaite réinventer l'économie, il faut faire participer les entreprises existantes, assure-t-il."

Une génération engagée, altruiste et les pieds sur terre

En tout cas la façon dont ces deux jeunes diplômés mènent leur embarcation est un formidable encouragement à l'action.

"On dit notre génération individualiste, fainéante et zappeuse, concluent-ils. Nous l'avons découverte engagée, altruiste et les pieds sur terre. Partout où nous sommes allés, en Europe, en Asie et en Afrique, nous avons rencontré des jeunes entrepreneurs passionnés, prêts à essayer de "faire autrement", en agissant à leur échelle.
Nous pensons que l'Europe, et la France en particulier, ont bien besoin aujourd'hui de la créativité, du dynamisme et des rêves de sa nouvelle génération !"

Alors, vous l'avez compris, n'ayez pas peur de vous lancer, n'attendez pas de tout savoir ou d'avoir un projet parfait, mais profitez des belles ressources offertes par certaines associations comme Ticket for change ou Makesense.

Comme le disent Matthieu et Jonas: "Il n'y a pas de parcours tout tracé pour se lancer. L'important est de trouver sa voie, qui permette de se sentir utile, de se développer soi-même et de prendre du plaisir !".
 

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